Mais les décrets de Dieu sont sacrés pour qui t’aime,
Et, plein de ton esprit, je les dois adorer.
Comme tu le serais, je suis fort dans mes larmes ;
Je garde ta doctrine, et ta foi m’agrandit ;
En de mâles adieux tu me lègues tes armes ;
Ta voix parle, j’entends ; voici ce qu’elle dit :
« Frère ! si Dieu te laisse ici-bas seul et triste,
C’est que l’homme nouveau dans ton cœur n’est pas né ;
La main de la douleur, cette sublime artiste,
Au gré du maître encor ne t’a pas façonné..
» Dans la sphère où je monte avant que de me suivre,
Il te reste à livrer de plus rudes combats ;
Ce n’est que pour lutter que tu dois encor vivre,
Et les adversités ne t’épargneront pas.
» Il te faut, comme moi, prendre la voie étroite ;
L’ombre abonde et les fleurs sur la route du mal ;
Celle où tu marcheras, plus âpre, mais plus droite,
Mène par le désert plus près de l’idéal.
» Tu porteras le poids de ton cœur solitaire ;
Déjà ton front penché se dépouille et pâlit ;
Nul œil ne sourira près de ta lyre austère,
Et la seule insomnie habitera ton lit.
» Jamais tu ne verras un champ dont tu sois maître
Se couvrir à ton gré de rameaux ou d’épis ;
Et jamais en des bois plantés par un ancêtre
Tes bras ne berceront des enfants assoupis.
» Sans même que l’oiseau pour son nid les recueille,
Tu verras sous les pas de l’homme indifférent
Tes stériles chansons s’envoler feuille à feuille,
Et jusqu’aux mers d’oubli couler dans le torrent.
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