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Les parents avaient su plier la jeune fille,
Avant qu’à son murmure un mot se fût mêlé ;
Elle chanta longtemps avant d’avoir parlé.

Trompant de tous les siens la tendre vigilance,
Comme un jeune chevreau loin du troupeau s’élance,
Vers les taillis lointains, dès qu’elle put courir,
Du chaume paternel elle cherchait à fuir.
Nul n’aurait deviné sur ce tendre visage
L’amitié du désert si fière et si sauvage ;
En vain d’autres amours dans son âme ont lutté,
Le charme des forêts Ta toujours emporté.

Lorsqu’après tout un jour passé dans les bois, seule,
Le retour lui montrait et la mère et l’aïeule
Encor pâles d’effroi pour l’enfant hasardeux,
Au lieu de la gronder pleurant toutes les deux,
Elle pleurait aussi, puis toute la soirée
Rendait de ses baisers la famille enivrée,
Mais, comme une eau mobile échappe de la main,
Au bois dès son lever fuyait le lendemain.
Là, sans s’inquiéter des soins qui nous poursuivent,
Robuste, elle vivait comme les oiseaux vivent ;
Ainsi qu’eux vagabonde, et trouvant sous ses pas
Mille fruits abondants tout prêts pour ses repas,
La fraise, et la framboise, et la faîne, et l’airelle,
La mûre, et l’aveline, encor plus doux pour elle
Que les fruits les plus beaux mûris dans nos vergers ;
Et parfois la noix fraîche et le pain des bergers ;
Et le miel s’écoulant des chênes par les fentes,
Et des troupeaux hardis qui broutent sur les pentes
Le lait tiède et chargé de ce parfum vital
Que donne la montagne à chaque végétal.
La chèvre aux bonds joyeux et l’es lentes génisses,