Page:Laprade - Psyché, 1857.djvu/239

Cette page n’a pas encore été corrigée


III

Le Bûcheron

 

I

Le chêne aux flancs noueux dans l’herbe est couché mort ;
Mais du vieux bûcheron c’est le dernier effort ;
Il pose sa cognée et s’accoude au long manche ;
Il se courbe, en soufflant, le pied sur une branche ;
Son morceau de pain noir est gagné pour demain ;
Et, s’essuyant le front du revers de la main :

« Triste et rude métier que de porter la hache !
A ce labeur de mort quel dieu m’a condamné ?
Sur tes plus beaux enfants j’ai frappé sans relâche,
Et je t’aime pourtant, forêt où je suis né !

» Ton ombre est mon pays ; j’y vieillis ; je sais l’âge
Des grands chênes épars sur les coteaux voisins.
Jamais je ne dormis dans les murs d’un village ;
Je ne cueillis jamais le blé ni les raisins.

» Ma mère me berça dans la mousse et l’écorce ;
J’ai, dans un nid pareil, vu dormir mes enfants ;
Et, comme moi jadis, fiers de leur jeune force,
Ils grimpaient, tout petits, sur l’arbre que je fends.