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Adore sans orgueil les Lares paternels,
Son fleuve, sa forêt, les astres éternels,
Et la nuit qui le berce, et l’aube qui réveille,
Et les riches saisons qui comblent sa corbeille,
Et tous ces dieux amis, ces esprits familiers
Errant dans la nature avec lui par milliers !
Jamais l’homme n’est seul dans ces douces vallées ;
D’hôtes chers et sacrés son cœur les voit peuplées ;
Tout lui parle, il comprend, il répond en tout lieu :
Chaque être qui l’entoure est son frère ou son dieu !
Dans le sentier paisible où sa marche est bornée,
Comme l’eau suit son cours, il suit sa destinée ;
Son joug, facile ou dur, ne l’a pas révolté :
Il meurt sans avoir craint et sans avoir douté !

Mais si, las d’adorer, il sonde la nature ;
S’il chérit moins la paix qu’il ne hait l’imposture
Si, pour voir ses dieux nus dans leurs antres secrets,
Il trouble leur sommeil de ses pas indiscrets ;
Pour les faire parler, s’il veut les mettre aux chaînes ;
S’il creuse leurs ruisseaux, et s’il fend leurs vieux chênes ;
Alors des eaux, de l’air, des fleurs, de toutes parts,
Comme des vols d’oiseaux s’en vont les dieux épars ;
Et, trompé comme nous dans son attente avide,
Il s’assied, l’œil en pleurs, seul en face du vide.
Dans ce morne royaume il cherche avec effroi
Après les dieux tombés quel est le dernier roi !


UNE VOIX.


La terre est conviée à des fêtes prochaines ;
L’ombre antique s’efface, et l’esprit rompt ses chaînes.
Hommes, ne pleurons pas sur nos dieux qui sont morts ;
Saluons leur sépulcre, et partons sans remords !