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 Des hommes désireux d’enseignements austères,
Et par de saints travaux préparés aux mystères,
Se levant tout à coup au bord des bois sacrés,
Du temple, avec lenteur, franchirent les degrés.
Ils marchaient deux à deux, vêtus de laine blanche,
Les pieds nus et le front ceint d’une verte branche.
Tous avaient dans l’eau pure, à l’ombre des forêts,
Plongé trois fois leur corps en invoquant Cérès ;
Tous avaient bu la veille aux amphores prescrites,
Et muni de flambeaux leurs mains de néophytes.
Ils étaient différents d’âges et de pays,
Mais un désir pareil les avait réunis ;
Et tels que des oiseaux qui, des bouts d’une plaine,
’Viennent s’abreuver tous à la même fontaine,
Pour y remplir leurs cœurs de sagesse altérés,
Aux sources d’Eleusis ils s’étaient rencontrés.

Comme un écho veillant sous le fronton antique,
Une voix leur jeta la formule mystique.
Alors s’ouvrit le temple immense et ténébreux :
Son souffle glacial fit dresser leurs cheveux,
Et sur le seuil, vêtu d’une pourpre flottante,
Le rameau d’or en main, parut l’hiérophante.


L’HIÉROPHANTE.


Pourquoi vos pas hardis troublent-ils les saints lieux ?
Hommes, dans leur repos laissez dormir les dieux !
Quel orgueil, ô mortels que la glèbe réclame,
Fait tomber de vos mains la charrue et la rame ?
Du joug des vils besoins sous qui tout front blanchit,
Du servage commun quel droit vous affranchit ?
Tandis que vous perdez les jours en vœux superbes,
Vos champs au lieu d’épis ont de mauvaises herbes ;