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Riaient, faisant de loin signe à leurs camarades.
Ils excitaient Lazare, et c’était un concert
De rire et de clameurs.

Mais l’homme du désert
Darde un œil tout-puissant sous sa fauve crinière,
Se dresse, et rejetant son front large en arrière :
« Fils d’Israël, dit-il, ô peuple sans pitié,
Par le joug des gentils justement châtié !
Si tu n’ouvres ton cœur à la miséricorde,
Comment espères-tu qu’un jour Dieu te l’accorde ?
Aussi vous bafouez et vous poussez aux coups,
Comme on pousse des chiens, deux hommes comme vous !
Aux pauvres voilà donc l’aumône que vous faites ?
Durs, moqueurs, insolents pour vos frères, vous êtes
Toujours prêts à ramper dans l’adoration,
Quand passent le licteur et le centurion.
Bien dignes de servir, de trembler sous un homme,
De marcher enchaînés vers Babylone ou Rome,
Vous qui ne servez plus le Seigneur, et riez
Des captifs qu’à son joug la misère a liés !
Les chiens des carrefours, les brutes vous enseignent
La pitié, mais en vain ! sur ces membres qui saignent,
Caressant aux lépreux, ils lèchent ; vous mordez !
Je vous reconnais bien ! c’est vous qui lapidez