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S’éveillaient et marchaient, frappés de ces rumeurs ;
Et couraient au-devant de celui qui châtie,
Et courbaient sous sa main leur tête repentie,
Jeûnant, marchant les reins du cilice entourés,
D’un besoin de douleur tout à coup dévorés.
Or, du maître en courroux, dont la voix tonne et gronde,
Plus le joug est sévère et plus la foule abonde ;
Et lui, les flagellant du fouet de leurs péchés,
Savait rouvrir aux pleurs les yeux les plus séchés.

« Age impur ! race avide, au front bas, à l’œil terne,
Qui gouverne le peuple et que la chair gouverne 1
Leurs monstrueux festins, leurs amours plus hideux,
Répandent, la famine et la peste autour d’eux.
Les plus divins trésors de la terre y périssent,
La perle s’y dissout, les vierges s’y flétrissent,
Et meurent par milliers dans leurs embrassements.
Tous leurs jeux sont ornés de l’aspect des tourments.
Des hommes, déchirés par ces hommes de proie,
Dans leurs viviers sanglants engraissent la lamproie.
Toi qui portes leur joug et le trouves si dur,
Peuple, en ta pauvreté, tu n’es pas moins impur !
Tu prends part, quand tu peux, à leur orgie infâme,
Où tous vous oubliez que vous avez une âme.
Vous, lâches affranchis, vous avez regretté