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J’ai traversé les flots inconnus des vivants ;
J’espérais vous trouver au moins sur l’autre rive :
Vers le lieu du repos dites-moi si j’arrive ;
De cette mer de feu trouverai-je le port ?
Me faut-il, au désert, marcher jusqu’à la mort ? »

— « La sphère éblouissante où l’on entre à ma suite
Est un feu sans repos, sans foyer, sans limite ;

Sur mon aile emporté, dans ces mondes brûlants
Sans atteindre le fond tu volerais mille ans.
Mais c’est assez ; tes yeux ont puisé de lumière
Ce qui peut en tenir sous l’humaine paupière ;
Va, tout plein du désert, prêchant ce qu’il t’apprit,
Homme, retourne aux lieux d’où t’a tiré l’Esprit. »

— « Moi, ton hôte, ô Seigneur ! m’enfermer dans les villes,
Et porter avec eux le joug des lois serviles…
Faire aspirer ton souffle à leurs poumons impurs ! »

— « T’ai-je dit d’habiter à l’ombre de leurs murs ?
Tu parlerais en vain dans leurs palais frivoles ;
Il faut l’ardent soleil, l’air libre à tes paroles.
Dans le bruit des cités la voix de Dieu se perd.
Il faut que les humains retournent au désert ;
Qu’ils brûlent leurs vieux toits, qu’ils partent ; qu’ils oublient