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l’objet suprême de l’enthousiasme et de l’amour nous n’avions aussi rendu témoignage à tous les nobles enthousiasmes dont l’amour de Dieu est le principe et la fin : enthousiasme de la famille, de l’amitié, de la patrie, de la liberté, de toutes les grandes causes qui peuvent foire battre un noble cœur.

Montrer aux hommes avec la croix le plus sublime exemple de douleur héroïquement acceptée, c’est leur » dire assez combien il est beau de braver la douleur. Au matérialisme qui s’empare de nous, qui rend ceux-ci efféminés et ceux-là féroces, qui donne aux uns l’insolence, aux autres la bassesse, opposons le dédain des jouissances et des misères de cette vie, le mépris du fait, et le culte inflexible du droit et de l’idéal. Ne défendons pas à la résignation chrétienne d’avoir ses audaces. La douleur, la pauvreté, la défaite doivent être portées avec humilité devant Dieu, avec fierté devant les hommes. En des jours tristement analogues à ceux où brilla le stoïcisme antique, le plus ferme secours que puisse trouver le monde moderne ballotté entre le despotisme et l’anarchie, il est dans ce mépris de la force au nom de la justice, dans cette négation de la douleur, dans un nouveau stoïcisme appuyé sur la foi chrétienne.

Si la société ne s’arrête sur la pente funeste où la matière entraîne l’intelligence, où le déchaînement des appétits et des passions vulgaires condamne à la servitude les nobles sentiments et les grands esprits, toute liberté sera impossible dans les âmes comme dans l’État ; car la liberté c’est la domination de la raison sur les instincts, l’ascendant légitime des hommes de bien sur les médiocres et sur les pires. Dans un âge ainsi condamné à