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Versez, sur ses pieds nus, votre âme toute pleine ;
Versez le fond du vase et les parfums cachés,
Les regrets, les espoirs, tout, jusqu’à vos péchés !
Versez les chastes jours et les nuits profanées,
Et l’asphodèle vierge et les roses fanées ;
Versez voire douleur, versez votre beauté.
Tout en vous est parfum, et tout sera compté !
Brisez au pied du Christ ce cœur doux et fragile,
Ce que la loi rejette est pris par l’Évangile,
Des épis oubliés sa moisson s’enrichit ;
A lui tout ce qui pleure, et tout ce qui fléchit ;
A lui la pénitente obscure et méprisée ;
A lui le nid sans mère, et la branche brisée ;
A lui tout ce qui vit sans filer ni semer ;
A lui le lis des champs qui ne sait qu’embaumer,
L’oiseau qui vole au ciel, insoucieux, et chante ;
A lui la beauté frêle, et l’enfance touchante,
Et ces hommes rêveurs qui sont toujours enfants,
Tous ceux sur qui le fort met ses pieds triomphants ;
Les faibles sont les siens, sa force les relève ;
Il porte dans ses mains la grâce et non le glaive.

Une eau mystérieuse a baigné vos genoux !
Le ciel même, ô Seigneur, a-t-il rien de plus doux ?
A ces flots onctueux, fumant d’un double arôme,