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Car ceux qui vont semant la parole de Dieu
Seront toujours errants et n’auront feu ni lieu.
Les temples, les palais tiennent leurs portes closes
Quand ils sentent passer le vent des grandes choses ;
Et le monde, effrayé dans ses vices, proscrit
L’ouvrier trop ardent des œuvres de l’Esprit.

Chez les hommes, pourtant, il leur faut un asile
A ces doux étrangers que tout le peuple exile ;
Sous un toit où leur corps se repose abrité,
Leur cœur, aussi, demande une hospitalité..
Plus lourd est le fardeau, plus la route est austère,
Plus, ils ont à souffrir des choses de la terre,
Et plus des biens du ciel ils ressentent l’attrait ;
Plus leur âme a besoin de s’ouvrir en secret,
D’offrir à respirer ses parfums qu’on ignore.
Car cette âme est semblable à la forêt sonore :
Le vent mugit en elle, et, de loin, le passant
Écoute avec effroi l’esprit retentissant ;
Sans se douter, à voir les chênes centenaires
Et le front des rochers noircis par les tonnerres,
Que, dans ce temple auguste aux piliers infinis,
Chaque arbre est ceint de fleurs et couronné de nids,
Qu’il exhale des voix et des odeurs bien douces,
Et qu’on dort, à ses pieds, sur des tapis de mousses.