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Sous le vent des erreurs, des songes faux ou vagues,
Jamais les passions n’ont tant gonflé leurs vagues ;
Jamais, chez les humains, des appétits plus vils
N’ont soulevé les flots des orages civils.

Ce n’est plus la tempête et les combats de l’âme !
L’esprit dort : c’est la chair qui gronde et qui réclame,
La chair qui veut aussi son jour de plein pouvoir,
Et tient son bon plaisir pour règle du devoir.
L’austère liberté n’est plus le bien qu’on prise ;
Aujourd’hui, ce qu’un peuple envie aux rois qu’il brise,
Oh ! ce n’est pas leur droit, leur honneur, hochet vain !
C’est leur verre plus grand et plein d’un meilleur vin ;
C’est la table et le lit, dans sa molle parure,
Où se vautre à loisir l’opulente luxure ;
Ce qu’il veut, c’est jouir, avec ses reins de fer,
Des vices somptueux qu’il abhorrait hier.
La chair est l’antre impur d’où sortent ces tempêtes,
Ces ouragans soufflés par tant de faux prophètes !

Pilote, Esprit divin, ne te cache donc plus !
Reviens de ton sommeil à la voix des élus ;
Que ton regard nous luise en sa douceur austère,
Et du port inconnu perce enfin le mystère !
Seigneur, nous périssons ! nos rêves décevants