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Au voyage sanglant le fils de l’homme est prêt ;
Et, marchant au désert, traverse Nazareth
A l’heure où, saluant l’aube qui la ravive,
S’éveille la cité plus fraîche et plus active.
Les joyeux artisans, par le coq avertis,
Entonnent leurs chansons au bruit de leurs outils ;
Les voisins, s’abordant de paroles amies,
S’égayent à frapper aux maisons endormies.
Sur la place déjà les marchands étrangers
Abreuvent les chameaux de leurs faix déchargés.
La serpe en mains, plusieurs vont voir, de l’œil du maître,
Leur vigne et leur froment qu’il faut cueillir peut-être ;
D’autres, se disputant sur leurs droits indécis,
Font parler les vieillards près de la porte assis ;
Deux longs flots de passants se croisent sous son arche :
Le gain ou le plaisir aiguillonne leur marche.
Or, cherchant la douleur, son but et son devoir,
Jésus ceignit ses reins et sortit sans les voir.

Le matin, colorant les gazons qu’il arrose,
Faisait tout verdoyer dans une vapeur rose.
Nul vent lourd et poudreux ne ternissait encor
Les bois tout d’émeraude et les froments tout d’or.
L’air se peuplait d’oiseaux. Fraîche, embaumée et tendre,