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Détournez vos regards des cités où nous sommes ;
Vos dieux en sont partis, et leur culte s’y perd…
Mais vous viendrez toujours visiter le désert,
Et j’y retrouverai votre esprit, loin des hommes.

Car c’est là que mon cœur aime à se souvenir ;
Là j’ai versé pour vous mes plus fécondes larmes :
Ami, vous m’y rendez du courage et des armes,
Sous ces chênes sacrés qui parlent d’avenir.

Quand je m’enivrerai de leurs accords sublimes,
Quand tout sera musique et parfum sous les cieux,
Quand tous les horizons s’étendront à mes yeux,
Quand je serai baigné de soleil sur les cimes ;

Dans ces jours où le monde est tout de flamme et d’or,
Où l’ardente couleur sur les formes ruisselle,
Où toute aile palpite et prend un large essor,
Où l’on boit à grand flot la vie universelle,

Si je sens sur mon front un esprit frémissant,
Si je respire l’être à plus larges haleines,
Si l’amour dans mon âme et le sang dans mes veines
Coulent en un accord plus calme et plus puissant ;

Si le rayon d’en haut m’éclaire avec largesse,
Si quelque mot d’espoir doucement soupiré
Fait entendre à mon cœur la voix de la sagesse…
Je saurai que c’est vous et je vous bénirai.