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arts : la France semble redevenue capable de la vraie peinture comme de la vraie poésie. Pendant ce temps-là cet art tout moderne dont l’éclosion véritable se place entre la Renaissance et la Réforme, la musique avait conquis, dès la fin du XVIIIe siècle, par Mozart, puis par Beethoven et par Rossini, une prépondérance jusqu’alors inouïe. Tous les arts, d’ailleurs, semblaient avoir rompu les barrières qui jadis en tenaient la culture si fort séparée de celle des lettres. Un souci tout nouveau de l’œuvre du musicien et du peintre s’emparait de l’imagination du poëte, souvent même des graves pensées du philosophe et de l’historien. De brillants et lointains voyages avaient renouvelé et enrichi un trésor d’images, un peu effacées Sous les doigts des copistes depuis les Latins et les Grecs. Nos écrivains commençaient à regarder des tableaux, à écouter des symphonies, et surtout à voir des paysages autre part que dans les livres.

Au moment même où les intelligences pénétraient dans ce nouveau monde de la musique avec Beethoven et Rossini, elles découvraient avec Chateaubriand et Lamartine, préparés par Rousseau et Bernardin de Saint-Pierre, toute une sphère de poésie nouvelle en France : le sentiment de la nature.

La musique, devenue l’art populaire, et s’emparant ainsi de la maîtrise des autres arts ; le sentiment de la nature s’éveillant dans toutes les âmes préparées par les passions ou la rêverie, modifiant les formes du style et le fond de la pensée dans tous les arts, peinture, musique et poésie : tels sont les deux grands faits qui dominent aujourd’hui le développement général de l’art.

Voici quelques-uns des résultats nécessaires de cette double action de l’élément musical et du sentiment de la nature sur les œuvres de l’esprit. Habitués au vague des émotions, à l’indétermination des idées par cette langue