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I.

Toi seule entre les monts as préservé la face
De l’affront qu’aux sommets imprime un pied humain.
Partout survient la fange où se forme un chemin :
Tu dois de rester pure à tes remparts de glace.

Par eux tes flancs sacrés conservent leur candeur.
Le soir, lorsque à tes pieds tout le pays est sombre,
De l’azur infini perçant la profondeur,
Des sommets fréquentés ton front domine l’ombre.

Toi-même as cependant tes vallons ténébreux,
Et tu tiens, par ta base, aux régions impures
Où l’eau du ciel se trouble à laver nos souillures,
Où l’homme teint de sang un sillon douloureux.

Mais au-dessus de tous, belle vierge de neige,
Attirant le premier l’onde et les feux du ciel,
Ton front chaste et hautain garde le privilège
De porter l’invisible et l’immatériel.

Dieu, pour trône ici-bas, a pris ta blanche cime,
Seul séjour assez pur pour qu’il s’y daigne asseoir ;
C’est lui, dans tes splendeurs, qui m’apparaît ce soir ;
C’est sa voix que j’entends sur ton glacier sublime.


II

Tu portes, ô mon âme ! un sommet tout pareil,
Un sommet virginal plus haut que tous nuages,