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la Grèce et l’Italie, a été appelée à donner sa mesure intellectuelle, le génie national, plus littéraire que poétique, a subordonné les arts proprement dits aux arts de la parole et particulièrement aux formes qui caractérisent l’éloquence et l’art oratoire. L’art maître, au siècle de Louis XIV, c’est bien celui de Corneille, de Racine, de Molière, de La Fontaine, mais c’est encore plus celui de Pascal, de Descartes, de Fénelon et de Bossuet ; c’est la belle prose française, la plus difficile et la plus solide de toutes les proses, après celle des anciens. Dans cette grande littérature du XVIIe siècle, la prose donne le ton à la poésie, au lieu de le recevoir d’elle comme chez les autres peuples. Mais cette prose est d’une si haute inspiration, d’un mouvement si spontané et si puissant, d’un contour si savant et si ferme, qu’elle atteint la poésie dans ses propres sphères et se confond avec elle quand elle n’arrive pas à la dépasser. De quelle noblesse et de quelle force d’âme, de quel admirable équilibre de toutes les facultés témoigne cet art de la grande époque française, c’est ce que l’on apprécie chaque jour davantage à mesure que l’on pénètre mieux l’histoire littéraire et surtout l’histoire morale des âges suivants.

Lorsque après cette éclipse de l’imagination et du style, qui a marqué la fin du dernier siècle et les premières années du nôtre, le génie de la France a brillé de nouveau, des facultés poétiques, jusqu’alors inconnues chez nous, ont éclaté dans notre littérature. C’est l’imagination, c’est la poésie lyrique, c’est la rêverie aux grandes ailes qui ouvrent l’école moderne avec Chateaubriand et Lamartine. L’austère clarté, la vigoureuse précision de la prose et de la pensée française attendent pour se réveiller le retour de la philosophie spiritualiste et l’avènement d’une autre muse nouvelle. la muse de l’histoire.

Une véritable rénovation s’opère aussi dans les autres