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religion ; la science moderne leur promet un rôle immense, des développements inouïs, un état qu’elle considère comme très supérieur à leur passé. Il s’agit de savoir si cette notion nouvelle des arts, conçue par les ingénieurs, les économistes, les agioteurs et quelques philosophes matérialistes, ne répugne pas, non seulement aux artistes, aux poètes, aux critiques, mais à l’essence même de l’art et de l’éternelle raison.

Voici la théorie positiviste sur l’art et son histoire :

L’art a pour objet de satisfaire a des besoins plus délicats et plus rares que les autres besoins de l’espèce humaine, mais qui ne sont pas d’une autre nature que les appétits matériels. L’industrie nous assure le nécessaire, l’art nous promet ces élégantes superfluités, ces raffinements, ce luxe enfin, qui deviennent pour l’homme civilisé une seconde nécessité presque aussi impérieuse que les besoins primitifs. A la suite de l’industrie, et sous la suprême direction de la science, l’art se développe, engendrant chaque jour des désirs nouveaux et plus apte chaque jour à produire des jouissances. En passant de l’empire de la religion sous celui de la science, en acceptant l’industrie comme un associé d’égale dignité et d’égale initiative, l’art ne peut que se multiplier et s’accroître ; il acquiert des moyens d’exécution plus prompts et plus faciles, une influence plus générale : il se met à portée de toutes les mains, de toutes les bourses, de toutes les âmes. Tant qu’il fut l’auxiliaire