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progrès oseraient-ils attribuer au sculpteur florentin une supériorité sans partage ? Voici ce qui est évident : de Memphis et d’Athènes, à Florence, à Rome et à Paris, l’architecture et la statuaire en trois mille ans n’ont pas fait un seul pas dans le progrès. Aux yeux des poètes et des vrais critiques, elles auraient plutôt déchu.

La peinture des anciens n’a pu survivre aussi complète que le marbre, leur bronze et leurgranit. Notre supériorité dans cet art et peut être présumée sans être certaine. Tenons donc Raphaël pour plus parfait qu’Appelles et Polygnote. Dans tous les genres autres que la représentation de la personne humaine, dans tous les détails et les accessoires de l’art, perspective, jeux de lumière, coloris, trompe-l’œil de toutes sortes, dans le paysage que nous avons créé, dans tous les ordres inférieurs, notre supériorité est éclatante. On ne saurait la contester dans l’expression des nuances du sentiment sur le visage ; mais, pour l’élégance et l’idéale beauté des contours, pour la perfection de la forme humaine, pour la force et la majesté viriles, pour la souriantes diversité des corps féminins, sommes-nous donc bien sûrs que Raphaël lui-même ait laissé si loin de lui les grands peintres de l’antiquité ?

Tout ce qui nous reste de la peinture antique, à Pompeï, à Rome et ailleurs, n’est pas œuvres d’artistes, mais de praticiens. Nous n’avons pas un lambeau de six pouces couverts par le pinceau d’un maître. Quelques pans de murailles, décorés par des