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bonté d’une cause. Détruire, c’est améliorer. La perfection n’est pas un mérite moral ; elle ne dépend pas d’une volonté droite et éclairée. Elle est imposée par le temps ; c’est une question de date.

On est bien forcé d’admettre quelques éclipses et quelques retards passagers dans cette marche ascensionnelle, inexplicables déviations de l’humanité fatalement ramenée dans la voie de l’avenir et condamnée, quoi qu’elle fasse, à la sagesse et au bonheur. Mais chaque révolution, chaque mouvement, chaque destruction nous rapproche, en définitive, d’un état supérieur. Brisons ce qui est bien, nous sommes assurés d’avoir mieux. En vain nous dissiperions l’héritage de nos enfant [sic] ; si appauvris, si mal élevés qu’ils soient, ils vaudront plus que nous, au moins dans leurs fils ou petits fils. En vain nous voudrions le mal ; c’est le bien qui s’accomplira.

Est-il, d’ailleurs, un mal moral dans ce système ! Je n’en découvre qu’un seul : la résistance à ce qui vont nous remplacer, l’esprit de conservation.

Voyez d’ici toute une morale nouvelle, entièrement nouvelle, immense progrès sur la vieille morale et la vieille politique !

Poursuivons : La religion est une forme essentiellement transitoire, la forme enfantine de la connaissance humaine ; c’est une œuvre d’imagination et de jeunesse, l’explication superficielle du problème du monde, que l’esprit se donne à lui-même avant l’âge de raison. Aux religions immobiles succède la science progressive ; elle pénètre de plus en plus profondément