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Chacun de nous alors, ayant Dieu pour flambeau
Dans sa plus pure essence à contemplé le beau,
Et vu, pour un moment, dans sa sphère étoilée
L’éternelle sagesse à la bonté mêlée.
Pour remonter vers elle et pour s’y fondre un jour,
L’âme a deux ailes d’or : la raison et l’amour !
Comme elles ont des dieux tiré leur origine,
Il faut pour les nourrir une essence divine ;
Quelque chose d’en haut sur la terre apporté.
Et c’est pourquoi chaque homme entrevoit la beauté,
La plus douce à la fois et la plus manifeste
Des trois perfections de l’unité céleste,
Et que l’esprit tombé qui dans la chair renaît
Même des yeux du corps sans peine reconnaît.
L’âme en qui se réveille et brille cette idée
Se rend libre du mal, et, par l’amour guidée,
Réglant l’essor du cœur par les sens combattu,
Au rang des immortels monte par la vertu.

« L’époux t’attend là-haut… C’est là-haut que j’aspire !
Et, préparant le vol qui doit nous y conduire,
J’aide ceux que vers moi l’attente fait venir
À retrouver l’idée au fond du souvenir.
D’amis jeunes et beaux souvent dans la campagne,
Alternant le discours, un groupe m’accompagne.
Assis sous le platane ou sous l’agnus-castus,
Auprès de quelque source, au bord de l’Ilissus,
Ou dans une palestre, ou sur ce promontoire,
Ou de fleurs couronné sur un siège d’ivoire
En un banquet riant par la muse enchanté,
Je leur parle d’amour et d’immortalité.
Ensemble nous cherchons le bien et la sagesse,
Et les Grâces parfois visitent ma vieillesse.