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Mais que sentent bientôt couler avec douceur
La fleur dans son calice et l’homme dans son cœur ;
Car leur souffle s’amasse et se métamorphose
En doux soupirs dans l’âme, en perles sur la rose.

Laisse ton cœur chanter sous l’invisible doigt ;
Bois les pleurs de la nuit comme une fleur les boit.
Si l’harmonie est douce et le flot pur, qu’importe
Quel point du ciel les verse, et quel vent les apporte ?
Le cygne, ivre d’amour, frémit sur le flot pur,
Sans connaître le fond de sa couche d’azur ;
L’oiseau qui pour la rose a des chansons divines,
De la fleur adorée a-t-il vu les racines ?
Aime, ainsi, sans savoir, aime au sein de la nuit ;
Le jour a des éclats que la volupté fuit.
Sans que les yeux distraits fassent trembler le vase,
Le cœur, pendant la nuit recueille mieux l’extase.
Vois ; quand le dieu du jour, au palais de la mer,
Va chercher le repos, et plonge pour aimer,
Avant de s’approcher de la couche odorante,
Il éteint ses rayons au seuil de son amante. »

Les voix ont répandu le chant mélodieux,
Sans guérir de Psyché les désirs curieux ;
Et l’orgueil et le doute, et la soif de science
S’agitent à la fois dans son âme en démence.

Sur les coussins de pourpre, à côté d’elle assis,
Éros, par les baisers, combattant ses soucis.
Lui tient de doux propos sur sa tristesse étrange,
Et l’ardeur du plaisir renaît dans cet échange.