Page:Laprade - Œuvres poétiques, Psyché, Lemerre.djvu/286

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.


Tout se réfléchissait dans votre âme profonde ;
Torrent, fleuve et ruisseau, tout vous payait tribut :
Vous deviez promptement épuiser tout un monde,
Et toucher dans un autre a l’invisible but.

Votre esprit visitait les chênes et les roses ;
Et, sans doute, sachant qu’à mon tour j’y viendrai,
Vous avez en partant laissé sur toutes choses
Des vestiges de vous : je les recueillerai !


II



Avec l’odeur montant de ces prés en corbeilles,
Avec l’oiseau qui fuit et va chanter là-bas,
De l’herbe et des rameaux, avec un bruit d’abeilles,
Un souvenir de vous s’élève à chaque pas.

L’atmosphère s’emplit d’une vivante flamme :
C’est vous qui de vos yeux la versez par éclair ;
Sa chaleur m’enveloppe, et j’ai senti mon âme
S’épanouir en vous comme mon corps dans l’air.

Alors la part de vous que Dieu nous a ravie,
Celle en qui rien ne change, et dont rien n’est distrait,
Celle qui goûte au ciel une meilleure vie,
Ce qu’en vous nous aimons, votre cœur m’apparaît.

Vous êtes revêtu de la forme plus pure
Que prend l’homme là-haut quand son corps y renaît.
Mais sous ce vêtement, quoiqu’il vous transfigure,
Vous êtes bien le même et l’on vous reconnaît.