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« Esprits qui dirigez l’ascension des sèves,
Urnes qui répandez la pensée et les rêves,
Essor auquel mon cœur s’abandonne aujourd’hui,
Donnez-lui le vouloir, l’action forte et sûre,
Réglez de tous ses pas le mode et la mesure,
Versez à travers moi votre harmonie en lui.

« Haleine du désert, senteurs dont je m’enivre,
Souffle de l’idéal qui m’avez fait revivre,
Par qui toute blessure est prompte à se fermer ;
Arômes fécondants que la brise balaie,
Descendez dans son cœur et pansez chaque plaie ;
Autant qu’il a souffert faites qu’il puisse aimer !

« Tombez, grains et rosée, en cette âme choisie,
Ravivez les moissons qu’attend la poésie ;
Qu’en lui l’homme nouveau sorte de l’homme ancien ;
Mûrissez, ô soleil, les épis qu’il nous cache
Dans les sillons secrets : car il faut qu’on le sache,
Le beau fut dans son cœur semé comme le bien.

« Que chacun de mes doigts, d’où mon âme ruisselle,
Du feu que j’aspirai lui verse une étincelle ;
Qu’il soit fortifié des forces que je prends ;
Que je fasse, investi pour lui d’un sacerdoce,
Du trépied solennel où mon amour m’exhausse,
Les bénédictions s’épancher par torrents ! »
Ami dont la pensée est partout ma compagne,
Voilà ce que j’ai dit pour vous sur la montagne.