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J’y couchai de mes mains la blanche trépassée,
Gravant sa douce image au fond de ma pensée.
L’invisible nature a repris, dès ce jour,
Et cache dans son sein tout ce que j’ai d’amour.

Sur la tombe, à genoux, durant la nuit entière,
J’y versai devant Dieu mes pleurs et ma prière.
Vers l’aube, un sommeil plein de songes merveilleux,
Sans assoupir mon cœur, descendit sur mes yeux ;
Et quand vint le soleil et l’hymne qui s’élève
Des sources et des nids, faire envoler mon rêve,
Sous l’émail odorant d’un gazon déjà vert
De son lit de repos le sol était couvert,
Et cet arbre divin, l’orgueil de la contrée,
Tout en fleurs de la grotte ornait déjà l’entrée.

Dès lors, hôte assidu de ce temple nouveau,
Je vis loin des humains, veillant sur ce tombeau ;
Des sources, des rochers, des fleurs, j’y fais l’étude ;
Les oiseaux qu’elle aimait peuplent ma solitude ;
Ils me fêtent comme elle, et de son souvenir,
Dans leurs chants, près de moi, viennent s’entretenir.
Nous avons un langage avec eux et les plantes ;
Ensemble nous faisons des prières ferventes ;
Nous parlons d’Hermia, du soleil et de Dieu.
Jaillissant du rocher, cette source au flot bleu
Où se baigne la lune, où les chevreuils vont boire,
De la divine enfant garde aussi la mémoire,
Et, comme ces rameaux par son âme agités,
Murmure avec amour les airs qu’elle a chantés.
Mêlant sa voix plus grave aux bruits que je consulte,
L’arbrisseau merveilleux, à qui je rends mon culte,