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Vie étrange empruntée à tous les éléments,
Prise aux forêts, aux flots, aux nids les plus aimants.
Mais comme un clair rayon dans l’épaisse feuillée
La pensée en son sein déjà s’est éveillée.


II


À cet âge où la vierge, avec des yeux baissés,
Éveille innocemment les amoureux pensers,
Où l’enfant avec qui l’on jouait tout à l’heure
Vous met le trouble au cœur, si sa main vous effleure ;
Où déjà du pêcher les rameaux rougissants
Font rêver aux doux fruits de ses boutons naissants ;
Où la jeune pudeur sème, aux moindres caresses,
Sa neige purpurine, abondante en promesses ;
Quand vint pour Hermia cette fraîche saison,
Chaque jour, sur ses pas, au seuil de la maison,
Aux champs, à la fontaine, elle vit, sans comprendre,
Les jeunes gens rivaux s’empresser d’un air tendre,
Implorer d’elle un mot, un sourire, un regard,
Fleurs que l’enfant distraite effeuillait au hasard.

L’arrachant pour une heure à sa chère retraite,
Si sa mère au hameau l’entraîne, un jour de fête,
Les jeux sont oubliés ; ni danses, ni chansons
Ne peuvent captiver la foule des garçons.
Autour d’elle un essaim de paroles flatteuses
Bourdonne, et des pasteurs les troupes curieuses
Se croisent à l’envi. Tels de gourmands oiseaux
Par bandes voltigeant, merles et passereaux,