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ÉPILOGUE



Chaque fois que je vis, rêveur adolescent,
Comme une aube aux doux feux, mais éteinte en naissant
Flotter à l’horizon ta robe purpurine,
Soudain au fond du ciel, sur la vague marine,
Tes pieds comme un éclair glissaient, ô Volupté !
Et, sur la pale mer, alors, de mon côté,
Une figure en deuil s’avançait à ta place :
Sa grande ombre effaçait les roses de ta trace.
L’ache et le nénuphar, dans ses cheveux séchés,
Se posaient sur mon front en couronne attachés.
Autour d’elle un essaim de noires mélodies
Heurtait en voltigeant mes tempes engourdies ;
Et comme un flot des mers affaissé sous son poids,
Mon cœur cessait de battre au toucher de ses doigts.

Sombre Mélancolie ! ô fatale déesse
Qu’à sa place en fuyant la Volupté nous laisse,
De tes pavots amers goutte à goutte abreuvé,
Nul homme plus que moi sur ton sein n’a rêvé ;
Nul n’a vu si souvent, frappé de ton vertige,
Fruits ou fleurs avorter dès qu’il touchait leur tige ;