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Quand un rameau languit, son regard le relève ;
Il y verse à la fois la chaleur et la sève ;
Et l’arbre en un matin ouvre tous ses bourgeons
Sans crainte de tarir aux futures saisons.

« Sans réserve et sans voile ici les cœurs se livrent ;
Sans lasser les époux, leurs bonheurs les enivrent ;
Rien ne redoute en vous le doigt ni le flambeau ;
Le millième baiser pour vous sera nouveau.

« L’amant vient revêtu de sa seule lumière
Vers la couche de pourpre, où, montant la première,
L’amante de ses bras qu’elle dénoue enfin,
Sur les pieds d’or du lit laisse tomber le lin.

« Ah ! tu peux à présent rassasier ta vue
De la divine forme autrefois entrevue.
Approche-toi, Psyché, de ton céleste amant ;
Qu’il soit ton seul spectacle et ton seul vêtement.
Toi, jeune Éros, répands tes parfums et l’enivre,
Elle qui vit par toi, comme elle te fait vivre ;
Et que le soleil vrai, saint, fécond, immortel,
Ravonnant sur ta couche, ô couple aimé du ciel !
Sur ton amour unique aux douceurs variées,
Fasse germer l’émail des fleurs multipliées.
Mêlez-vous l’un à l’autre, et pour l’éternité,
Sur un lit radieux, ô vous, Amour, Beauté ! »

Hors du cercle des dieux, dont les graves sourires
Les suivent longuement avec la voix des lyres,
Glissent les deux époux vers les toits retirés
Que leur garde l’Hymen au fond des bois sacrés.