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Vois aux sources du vrai l’homme enfin s’abreuvant,
Et l’accord fraternel de tout être vivant.
C’est Psyché qui marqua l’univers de ton signe.
De l’époux idéal par son cœur elle est digne ;
Sous ses doigts patients pétri jusqu’à ce jour,
Maître, le monde a pris la forme de l’amour.
Pour mériter l’hymen qu’interrompit sa faute,
Imaginerais-tu quelque offrande plus haute !

« Ô père ! reçois donc Psyché, la veuve en pleurs.
Laisse-nous l’amener, nous, les Grâces ses sœurs ;
Nous, tes plus purs rayons ; nous, filles du sourire,
Du regard complaisant que cette âme a vu luire,
Quand du jeune univers tu lui faisais le don,
Quand tu jugeais ton œuvre en disant : Tout est bon !
Nous trois qui, par la main nous tenant sur tes traces,
Secouons des parfums en tous lieux où tu passes :
Qui doucement vers toi guidons les suppliants ;
Qui, des belles vertus, te présentons l’encens ;
Nous, de tes dons sacrés les fidèles courrières,
Par qui la Pitié sainte et le chœur des Prières
Au mode lydien ont cadencé leur chant,
Et levé chastement leur voile en t’approchant ;
Nous par qui la senteur dans l’arbre s’insinue,
Et le tendre penser dans la vierge ingénue ;
Nous par qui l’âme aux yeux brille à travers le corps,
Par qui tout est rangé sous la loi des accords ;
Qui revêtons le bien de la beauté suprême :
Nous les trois Charités qu’on admire et qu’on aime ! »

Et de leur coupe pleine oublieux un moment,
Les dieux parlaient aussi pour l’amante et l’amant.