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PERNETTE.


Que d’affronts au foyer sous l’ardoise ou le chaume.
Après ce grand affront fait à tout le royaume !
Faudra-t-il donc subir, muet, pâle et tremblant,
Les caprices hautains du Barbare insolent ?

Mais Pierre avait au cœur, exaltés dès l’enfance,
Tous les nobles orgueils qu’un tel servage offense ;
avait respiré deux âmes à la fois,
Les leçons du vieux prêtre et la fierté des bois.
Chez lui, l’amour du sol et du clocher rustique
S’ornait des souvenirs de l’héroïsme antique.
Il avait lu, transcrit de ses robustes mains
Vos sublimes conseils, précepteurs des humains !
Ces grands vers qui, trouvant quelques âmes dociles,
Nous poussent du côté des vertus difficiles.

Un rapide combat se livra dans son cœur ;
Il en sortit navré, mais il était vainqueur ;
Et d’un accent profond :


« Certes, je hais cet homme

Comme je hais le mal, de quel nom qu’il se nomme ;
Et, de mes faibles mains, je voudrais ardemment
Être pour quelque chose en son écroulement !
Aussi, c’est pour moi-même une injure soufferte
De voir d’autres que nous triompher de sa perte,
D’avoir des alliés dans l’œuvre d’aujourd’hui…
Sa chute est une affaire entre la France et lui !
Lui l’insolent orgueil, nous la fierté rebelle,
Nous devons seul à seul vider notre querelle,
Arrière l’étranger, ce vainqueur de hasard !
De ma juste vengeance il me prend une part.