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XLV

L’ESCALADE


I



Du sommet, vierge encor, but de notre journée,
Et d’où la plaine immense est au loin dominée,
Un taillis nous sépare, ardu, planté de houx,
Hérissé de bruyère entre de noirs cailloux.
Las de gravir, assis sur un roc de basalte,
Avant l’heure, aux trois quarts du chemin je fais halte.
Tourné vers ces hauts lieux d’où je me sens banni,
J’étanche la sueur de mon front dégarni.
Mais eux ! comme enivrés d’être seuls et sans guide,
Dressant vers l’inconnu leur jeune tête avide,
Et par de joyeux cris l’un l’autre s’animant,
Les deux vaillants garçons grimpent allègrement.
Moi, je les suis du cœur, et, comme dans un rêve,
Je crois que mon désir les porte et les soulève ;