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LE LIVRE D’UN PÈRE.

Coupant et liant ses javelles
Sous les morsures du soleil.

Mais voyez aussi quelle joie
Lorsque, aux douces fraîcheurs du soir,
Les taureaux et le char qui ploie
Portent la grand’gerbe au manoir !


II


Enfants, je conduis la charrue
Sur un sol dur, sous un ciel froid,
Pour que la moisson reste accrue,
La moisson d’un domaine étroit.

Je tâche, au sillon que je creuse,
De semer encor vaillamment
Une récolte généreuse
De grain choisi, de pur froment.

Ainsi, durant l’automne sombre,
Tout père jusqu’au dernier jour,
À travers des peines sans nombre,
Poursuit l’œuvre de son labour,

Afin qu’en la saison prochaine,
Les bras d’un jeune moissonneur,
Sur la vieille table de chêne
Déposent la gerbe d’honneur.