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LE LIVRE D’UN PÈRE.


Je cherche, au dedans de moi-même,
À m’excuser sur quelque point ;
Pour quelles raisons je vous aime ?…
Et, vraiment, je n’en trouve point.

Vous travaillez avec paresse,
Vous êtes grognons, étourdis ;
Et, quand je parle de sagesse,
Vous riez à ce que je dis.

On ne m’a pas fait de mensonge :
Je fus trop facile et trop doux…
Et — je tremble, hélas ! quand j’y songe,
Je suis responsable de vous !

Jamais le monde ne fait grâce,
Vous le saurez tous, mais trop tard ;
Et du châtiment qui menace
Le pauvre père aura sa part.

Si par orgueil, ou par paresse,
Vous prenez de mauvais chemins,
Songez au nom que je vous laisse :
Ma mémoire est entre vos mains.

Vous savez le but de ma vie ?
C’est vous. Et j’ai mis mon bonheur
À travailler, sans autre envie
due d’accroître un peu votre honneur.

Vers ce but j’ai marché sans trêve
Et j’y marcherai jusqu’au soir.