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Puisqu’on me réchauffant, comme eût fait une mère,
A ton hôte engourdi tu rends force et gaîté,
Je dois, en mes adieux, selon le vieil Homère,
Payer d’une chanson ton hospitalité.

N’es-tu pas, à l’égal de la blonde Ionie,
Riche de l’olivier, de la vigne et du miel ;
N’offres-tu pas, comme elle, aux pinceaux du génie
L’azur au bord des mers, la pourpre au fond du ciel ?

A l’abri de tes caps ruisselants de lumière,
Heureux de contempler des horizons connus,
Les fils des Phocéens, debout sur leur galère,
Dans le golfe natal se croyaient revenus.

Tes coteaux verdoyants sous le myrte et l’acanthe,
Pareils aux coteaux grecs en ont reçu les noms ;
Et tes rochers de marbre à la cime éclatante
Semblent faits pour porter aussi des Parthénons.

Sous ton ciel, qui des mers enflamme l’étendue,
D’Athène à Sunium on croit errer encor ;
La Muse ionienne est chez toi descendue ;
Elle vient m’y parler devant les Iles d’Or.

Elle habite à jamais ton rivage, ô Provence !
Elle y donne à tes fils, comme aux Grecs leurs aïeux,
Le fleuve du parler et la vive éloquence,
Et l’âme qui s’épanche à flots mélodieux.

Comme l’huile et le vin coulent de tes amphores,
Tes chantres, à ton ciel empruntant ses couleurs,