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V

À LYON


 
Si j’ai conduit, souvent, la Muse loin des villes,
Amoureux du désert et des sentiers secrets ;
Si j’enlaçais, hier, dans mes loisirs tranquilles,
L’olivier de Provence au chêne du Forez ;

Si j’ai trop écouté l’esprit des solitudes ;
Si, des sapins neigeux aux myrtes toujours verts,
Errant parmi ces bois où j’ai mes habitudes,
J’ai perdu tant de jours et glané tant de vers ;

Si l’oiseau, tout trempé de brouillard et de suie,
Cherche à baigner sa plume en un rayon vermeil ;
Si pour verdir encore, après nos mois de pluie,
Mes chansons et mes fleurs ont besoin de soleil…

Ne croyez pas, amis, que sa douce lumière
Soit seule à m’apporter la vie et la chaleur,
Et que ma poésie, en sa sève première,
Soit le fruit du printemps… et non pas de mon cœur !

Je n’ai pas tout reçu de la verte nature,
Des champs et des forêts où je me plais encor,