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Voilà ce que la mort a d’extase à donner
Au martyr dont le front commence à rayonner,.
Mais si tu crois qu’au seuil d’une tombe héroïque,
Une larme en coulant ternisse un nom stoïque,
Si tu veux, ô Marco, retenir par orgueil
Cette perle du ciel qui tremble dans ton œil...
Il fallait de ta mère écarter la pensée,
Oublier ton amante à sa prison laissée,
Et, près de ton cercueil, ne pas les voir du cœur
S’éteindre et longuement mourir de leur douleur.

Le fer a retenti des armes qu’on apprête,
Et, distrait de son rêve, Herman lève la tête ;
L’indifférent regard que son œil promenait,
Sur le front de Marco tombe ; il le reconnaît...
De quel pli de son cœur sort cet éclair rapide,
Le premier dont rougit ce front terne et livide,
Ce sursaut que le mors imprime à son cheval,
O chef, est-ce d’un lâche ou d’un noble rival ?
Est-ce un bouillonnement du sang ou de la boue ?
Le fusil des soldats touche déjà leur joue ;
Toi, tu couves Marco sous le même regard ;
Ta lèvre étrangement se plisse... le feu part !
Et, pour s’offrir à lui soudainement dressée,
Dans les touffes de joncs où sa barque est glissée,
Comme un oiseau plongeur qui lève enfin le cou,
Grande et blanche, Fausta se montra tout à coup,
Et, sur son large sein qu’un noble orgueil enivre,
Elle a reçu sa part du plomb qui les délivre.

Elle est encor debout dans sa robe de lis,
Tandis qu’un flot de pourpre en inonde les plis,