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Mais quand les bois sacrés m’ouvrirent leurs arcades,
Quand sous les noirs sapins j’eus gravi les hauts lieux,
Sur les glaciers, au bruit des vents et des cascades,
L’invisible apparut et dessilla mes yeux.

Dès lors à ce soleil sans nuage et sans tache,
Mon âme voit des champs plus touffus et plus verts ;
Sous les flots et les fleurs sentant ce qui se cache,
Pour son hôte inconnu j’aime cet univers.


ADMÈTE

En aimant ces beaux lieux, moi, c’est Myrto que j’aime ;
J’y cueille pas à pas ses traces qu’elle y sème ;
C’est dans les champs surtout qu’absente je la vois ;
J’entends ses pieds courir sur la mousse des bois ;
La menthe et le rosier m’apportent son haleine ;
Ces épis en flots d’or ondulant sur la plaine.
C’est l’or de ces cheveux ; la neige a sa blancheur ;
L’alouette a sa voix, la colombe est sa sœur ;
La source est un miroir qui retient son image ;
Le soupir de la vague en mourant sur la plage,
Ces feuillages émus qui parlent mollement.
C’est, parmi nos baisers, son doux gémissement.


ERWYNN.

Le magique pouvoir qui t’a soumis mon âme
N’est pas en d’autres yeux ni dans une autre main ;
Ta beauté ne tient pas aux traces d’une femme,
Ce que je cherche en toi n’est pas l’aspect humain ;