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Mais d’un charme emprunté des grâces de l’amante.
Aveugle avant d’aimer, dans mes rudes penchants,
Je ne me doutais pas de la beauté des champs.


ERWYNN.

Quels yeux ont des regards profonds comme ces ondes
Sur qui le noir sapin s’incline échevelé ?
Quel front si pur de vierge a, sous ses tresses blondes,
De ces sommets neigeux l’éclat immaculé ?
Quelle voix a l’accent du flot baisant les rives ?
Quel amoureux silence est plus délicieux
Et verse un plus long rêve aux âmes attentives
Que l’entretien muet des bois silencieux ?


ADMÈTE.

Au bord du lac, un jour, sous l’aune et sous le frêne,
Belle et sans voile, ainsi qu’une jeune sirène,
J’ai vu Myrto tordant l’or de ses longs cheveux :
Des perles en tombaient et ridaient les flots bleus.
La blancheur de son corps par les rameaux couverte
Rend l’eau plus sombre autour et la feuille plus verte,
Et sur ses pieds de rose arrive en surnageant
Parmi l’or d’un fin sable une écume d’argent.
De ses yeux, de son sein et de ses tresses blondes
Un reflet émané flotte au-dessus des ondes ;
Et des ombres du bain sous le roc abrité
Cette molle lueur remplit l’obscurité.
Moi, je bénis tout bas l’invitante Naïade,
Et Pan qui me cacha sous cette ombreuse arcade,
Et les ardeurs de l’air et la fraîcheur de l’eau.