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J’aimais en vous l’espoir : vous m’apportiez en foule
Des promesses que Dieu n’a pas voulu tenir ;
Désormais tout, chez moi, s’assombrit et s’écroule :
Et je hais le passé, n’ayant plus d’avenir.

Je sais, ô mes printemps ! j’ai vu ce que vous êtes
Sans les illusions dont vous fûtes ornés ;
Quand le temps a flétri vos couronnes de fêtes,
Le remords apparaît sur vos fronts décharnés.


les corbeaux.

Voici l’hiver lugubre et son affreux cortège
D’oiseaux noirs répandus sur son linceul de neige.
Les corbeaux ont senti le parfum de la mort.
Ils viennent, enhardis en leurs instincts funestes ;
De nos belles saisons ils dévorent les restes,
Croassants et rongeurs, et pareils au remords.

Là, les débris sanglants du coursier plein d’audace
Dont le vol idéal nous portait dans l’espace ;
Ici, le chien fidèle à son maître oublieux ;
Là, le cygne plaintif et la tendre colombe…
Bien, corbeau ! fais rouler sur cette fraîche tombe
Ce crâne chauve et blanc dont tu crevas les yeux.


adah.

Hier, je vous pleurais ; je désirais peut-être,
Ô mes Jeunes saisons, revoir vos jours si doux ;
Maintenant je dirais, si vous pouviez renaître :
Fuyez, ô mes printemps ! je ne veux plus de vous.