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Vous aussi vous aurez ma voix qui vous fait peur,
Et mes yeux qu’on redoute.

Car vous ne voudrez pas exposer votre deuil
À la foule qui passe ;
À défaut du bonheur, gardons au moins l’orgueil
Pour dernière cuirasse !

Repoussons des humains l’insolente pitié :
Mieux vaut leur lâche envie.
Jetons comme un mépris, à leur fausse amitié,
L’éclat de notre vie.

Je veux faire pâlir le printemps et l’été
Devant ma belle automne ;
Du charme rayonnant de ma sérénité
Je veux que l’on s’étonne.

Je veux plus haut qu’eux tous rire et chanter encor !
Je veux, je veux répandre
Mes plus sombres pensers avec une voix d’or,
Avec un regard tendre.

Que chacun loue en moi la stoïque raison,
La tendresse divine…
Quand chaque flot de miel portera son poison,
Chaque fleur son épine.

Viens, ô consolateur que j’insultais hier !
Sois mon amer génie.
Oh ! viens m’ouvrir ton temple, asile d’un cœur fier,
Ironie, Ironie !