Page:Laprade - Œuvres poétiques, Les Symphonies, 1878.djvu/308

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Viens baiser avec moi le tronçon de ce glaive
Tout sanglant dans ma main.

Je te prête un moment ce fer que ton enfance
S’essayait à tirer en invoquant la France,
Ce glaive en qui tu crois ;
Arme du vieil honneur, fidèle et bien trempée,
Que l’on peut au combat brandir comme une épée,
Baiser comme une croix. »


HERMAN.

Héros et demi-dieux dont l’histoire est le temple,
Honneur des anciens jours qu’enfant je poursuivais,
Vous offrez vainement la lumière et l’exemple
À qui respire encor l’air de ce temps mauvais.

La vertu n’a plus d’aile et de sainte folie ;
Tout conspire à courber, à briser l’homme fier ;
Le destin est complice ; et sous sa main de fer,
Devant toute bassesse, il faut qu’on s’humilie.

Le beau s’est retiré de tout… même du bien !
Oh ! dites-moi, l’esprit que votre amour élève,
Qui vit de votre culte, et n’aspire à plus rien,
Qu’à rester digne encor de vous et de son rêve,

Par où doit-il marcher dans cette épaisse nuit ?
Tous les chemins frayés nous mènent à l’abîme.
Toi dont le livre ardent m’exhorte et me conduit,
Parle ! un dernier conseil, poëte magnanime,