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Contre les faux plaisirs le bonheur est une arme ;
J’ai triomphé sitôt que ton sourire a lui ;
Mais je perds avec toi ma victoire et son charme ;
Tout mon cœur m’a quitté du jour où tu m’as fui.

Pourquoi vivre et lutter ; nulle espérance humaine,
Hormis ton seul amour, n’excite un rêve en moi.
Sous mon fardeau d’ennui que je soulève à peine,
Pourquoi marcher encor ? mon seul but, c’était toi ;

Toi, toujours impossible et toujours séparée ;
Toi, qu’il m’est interdit de servir à genoux ;
Toi, qui de ton Éden m’as défendu l’entrée,
Par ce seul mot : devoir, flamboyant devant nous !

Pourquoi vivre et traîner ma blessure éternelle,
Mes chastes souvenirs plus âpres qu’un remord ?
L’amour tel qu’on le sent, lorsqu’on est aimé d’elle,
Nous arrache à la terre et m’invite à la mort.

Il est parti le doux message ;
Je pleurais bien en l’écrivant ;
Dieu le guide, il s’est fait passage !
Il parviendra le doux message ;
Pleure encore en le recevant.


ROSA.

Dans cet exil où je te pleure,
Va ! tout mon cœur te reste uni.
Pour nous y trouver à tout heure,
Dieu nous ouvre son infini.