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Son charme a pénétré dans ma douleur que j’aime ;
De fleurs et de parfums je sens mon front baigné.

Oui, c’est là Béatrix ! ses pleurs et son sourire
Réveillent en mon cœur d’ineffables accords ;
Et l’éclair de ses yeux, dardé pour me conduire,
Me lance vers le ciel et m’arrache à mon corps.

Qu’importe le passé ! je sens tomber mes chaînes ;
Comme d’un frais berceau je sors de ma prison ;
Je respire, déjà, dans les saisons prochaines,
Un souffle d’infini qui passe à l’horizon.

Partons, ô Béatrix, je te suis dans la nue !
Mais je veux, pour ta gloire, écrire, auparavant,
Sur les murs du cachot où je t’ai reconnue :
« Entré mort en ces lieux, Konrad en sort vivant. »





LIVRE TROISIÈME



BÉATRIX.

Mon nom est allégresse, heureux qui le prononce !
Venez dans mes jardins où l’on est transformé ;
J’écarterai de vous les cailloux et la ronce.

Cueillez votre bonheur où Dieu vous l’a semé.
Pour entrer dans la gloire, où je veux vous conduire,
C’est peu d’avoir souffert, si l’on n’a pas aimé,