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Alors rappelle-toi que je suis ton enfant,
Que tu m’as fait poëte, et que l’honneur t’en reste.

Donne à mon souvenir quelque humble monument ;
Que la mort me ramène en un lit que j’envie,
Au pied des monts si chers d’où m’a chassé la vie,
Et vers qui mon espoir s’élance à tout moment.

Là, j’ai rêvé la tombe où je voudrais descendre ;
Là, d’avance, implorant le suprême repos,
Je voudrais rapporter la maternelle cendre,
Pour que les os des miens s’y mêlent à mes os.

Toi, dont le vieux granit survit à tous les marbres,
Terre où nous dormirons dans l’éternelle paix,
Fais sur nous verdoyer tes gazons plus épais ;
Fais, dans l’air frémissant, chanter tes plus grands arbres.

Que tout, ruches et nids, fourmille en ce beau lieu ;
Que la vie en sa fleur fête ma sépulture,
Pour que mon âme, encore, entende au sein de Dieu
Tes voix que j’essayai de traduire, ô Nature !



PROLOGUE



AVRIL.

C’est moi qui décoche à ta vitre
Ce rayon d’or leste et joyeux
Dont le feu, sur ton noir pupitre,
Tombe et rejaillit dans tes yeux.