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Nature ! et qu’au delà de ta dernière étoile,
En face de ton roi,
L’éternelle beauté, dont tu n’es que le voile,
Paraîtra devant moi.




V

LA MUSE ARMÉE





Oui, l’austère amitié qui te lie aux grands chênes,
Ce charme du désert qui t’enivre toujours,
S’ils t’ont fait ignorer nos calculs et nos haines,
Ont agrandi ton cœur pour les nobles amours.

Quand tu disais : Mon frère ! à l’arbre sans culture ;
Quand les oiseaux du ciel venaient baiser tes mains,
Ô toi qui pour famille avais pris la nature,
Non, tu n’abjurais pas la cité des humains !

Au fond des bois sacrés où tu te réfugies,
Poëte aimé du chêne et du vieux bûcheron,
Tu voulais échapper au bruit de nos orgies ;
Mais tu redescendras à l’appel du clairon.

Tu n’as point redouté nos combats, mais nos fêtes.
Sur la neige éternelle ou sur le sable en feu,