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CHAPITRE PREMIER.

Des forces et de leur composition.


Un corps nous paroît être en mouvement, lorsqu’il change de situation par rapport à un système de corps que nous jugeons en repos. Ainsi, dans un vaisseau mu d’une manière uniforme, les corps nous semblent se mouvoir, lorsqu’ils répondent successivement à ses diverses parties. Ce mouvement n’est que relatif ; car le vaisseau se meut sur la surface de la mer qui tourne autour de l’axe de la terre dont le centre se meut autour du soleil qui lui-même est emporté dans l’espace avec la terre et les planètes. Pour concevoir un terme à ces mouvemens, et pour arriver enfin à des points fixes d’où l’on puisse compter le mouvement absolu des corps ; on imagine un espace sans bornes, immobile et pénétrable à la matière. C’est aux parties de cet espace réel ou idéal, que nous rapportons par la pensée, la position des corps ; et nous les concevons en mouvement, lorsqu’ils répondent successivement à divers lieux de cet espace.

La nature de cette modification singulière en vertu de laquelle un corps est transporté d’un lieu dans un autre, est et sera toujours inconnue. Elle a été désignée sous le nom de force ; on ne peut déterminer que ses effets, et les loix de son action.

L’effet d’une force agissante sur un point matériel, est de le mettre en mouvement, si rien ne s’y oppose. La direction de la force, est la droite qu’elle tend à lui faire décrire. Il est visible que si deux forces agissent dans le même sens, elles s’ajoutent l'une à l’autre ; et que si elles agissent en sens contraire, le point ne se meut qu’en vertu de leur différence, en sorte qu’il resteroit en repos, si elles étoient égales.