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saire, et que la partie dure jusqu’à ce que l’un des joueurs n’ait plus de jetons. Le calcul des probabilités nous montre que pour l’égalité du jeu, les mises des joueurs doivent être en raison inverse de leurs jetons. Mais s’il existe entre leurs adresses une petite inégalité inconnue, elle favorise celui des joueurs qui a le plus petit nombre de jetons. Sa probabilité de gagner la partie augmente si les joueurs conviennent de doubler, de tripler leurs jetons ; et elle serait ou la même que la probabilité de l’autre joueur, dans le cas où les nombres de leurs jetons deviendraient infinis, en conservant toujours le même rapport.

On peut corriger l’influence de ces inégalités inconnues, en les soumettant elles-mêmes aux chances du hasard. Ainsi au jeu de croix ou pile, si l’on a une seconde pièce que l’on projette chaque fois avec la première, et que l’on convienne de nommer constamment croix la face amenée par cette seconde pièce, la probabilité d’amener croix deux fois de suite avec la première pièce, approchera beaucoup plus d’un quart que dans le cas d’une seule pièce. Dans ce dernier cas, la différence est le carré du petit accroissement de possibilité que l’inégalité inconnue donne à la face de la première pièce qu’elle favorise : dans l’autre cas, cette différence est le quadruple pro-