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sur les probabilités.

genre, et produisent les mêmes effets. Plus la similitude est parfaite, plus cette probabilité augmente. Ainsi nous jugeons sans aucun doute que des êtres pourvus des mêmes organes, exécutant les mêmes choses, éprouvent les mêmes sensations et sont mus par les mêmes désirs. La probabilité que les animaux qui se rapprochent de nous par leurs organes, ont des sensations analogues aux nôtres, quoiqu’un peu inférieure à celle qui est relative aux individus de notre espèce, est encore excessivement grande ; et il a fallu toute l’influence des préjugés religieux pour faire penser à quelques philosophes que les animaux sont de purs automates. La probabilité de l’existence du sentiment décroît à mesure que la similitude des organes avec les nôtres diminue ; mais elle est toujours très forte, même pour les insectes. En voyant ceux d’une même espèce exécuter des choses fort compliquées, exactement de la même manière, de générations en générations et sans les avoir apprises, on est porté à croire qu’ils agissent par une sorte d’affinité, analogue à celle qui rapproche les molécules des cristaux, mais qui, se mêlant au sentiment attaché à toute organisation animale, produit, avec la régularité des combinaisons chimiques, des combinaisons beaucoup plus singu-