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essai philosophique

qui entraînent l’esprit sans qu’il y pense. Qui a démontré qu’il fera demain jour, et que nous mourrons ? et qu’y a-t-il de plus universellement cru ? C’est donc la coutume qui nous en persuade ; c’est elle qui fait tant de turcs et de païens ; c’est elle qui fait les métiers, les soldats, etc. Il est vrai qu’il ne faut pas commencer par elle pour trouver la vérité ; mais il faut avoir recours à elle quand une fois l’esprit a vu où est la vérité, afin de nous abreuver et de nous teindre de cette croyance qui nous échappe à toute heure ; car d’en avoir toujours les preuves présentes, c’est trop d’affaires. Il faut acquérir une croyance plus facile, qui est celle de l’habitude qui, sans violence, sans art, sans argument, nous fait croire les choses, et incline toutes nos puissances à cette croyance, en sorte que notre âme y tombe naturellement. Ce n’est pas assez de ne croire que par la force de la conviction, si les sens nous portent à croire le contraire. Il faut donc faire marcher nos deux pièces ensemble : l’esprit, par les raisons qu’il suffit d’avoir vues une fois en sa vie ; et les sens, par la coutume, et en ne leur permettant pas de s’incliner au contraire. »

Le moyen que propose Pascal pour la conversion d’un incrédule, peut être employé avec