Page:Laplace - Essai philosophique sur les probabilités.djvu/230

Cette page a été validée par deux contributeurs.
222
essai philosophique

Par elle, on ressent les maux d’autrui, et l’on partage le contentement du malheureux qu’on soulage. Mais je ne veux ici qu’exposer les principes de Psychologie, sans entrer dans le développement de leurs conséquences[1].

L’un de ces principes, le plus fécond de tous, est celui de la liaison de toutes les choses qui ont eu dans le sensorium une existence simultanée ou régulièrement successive ; liaison qui, par le retour de l’une d’elles, rappelle les autres. Les objets que nous avons déjà vus, réveillent les traces des choses qui, dans la première vue, leur étaient associées. Ces traces réveillent semblablement celle des autres objets, et ainsi de suite ; en sorte qu’à l’occasion d’une chose présente, nous pouvons en rappeler une infinité d’autres, et arrêter notre attention sur celles que nous voulons considérer. À ce principe se rattache l’emploi des signes et des langues pour le rappel des sensations et des idées, pour la formation de l’analyse des idées complexes, abstraites et générales, et pour le raisonnement. Plu-


  1. La narration que Montaigne fait dans ses Essais, de l’amitié qui existait entre lui et la Boëtie, offre un exemple bien remarquable d’un genre de sympathie extrêmement rare.